Dans la richesse comme dans la pauvreté | Mr & Mme Thénardier

Dans la richesse comme dans la pauvreté

Les derniers jours avaient été mouvementés, c’était le cas de le dire. Et les Thénardier avaient été directement pris au jeu, étant donné qu’Eponine avait été les jouer les on ne savait trop quoi et était revenue avec une main en moins. Elle leur aura vraiment tout fait cette gamine. Mais en soit, la mère de famille était tout de même rassurée de s’être vue revenir sa fille en un seul morceau, mais si elle en avait perdu un en cours de route, elle était toujours en vie.

Elle ne le montrait pas souvent, voire quasiment jamais, mais Mathilde Thénardier restait tout de même une mère. Pas la mère du siècle, ça allait de soit, elle avait abandonné ses deux derniers, par faute de moyens pour les élever, elle laissait Gavroche vivre dans la rue, mais c’était son choix, et elle n’était pas tendre avec ses deux filles, mais il fallait bien leur apprendre la vie, et qu’elles ne servent pas à rien dans cette famille. Dans tous les cas, cela n’enlevait rien au fait qu’au fond d’elle, tout au fond, elle avait tout de même un certain instinct maternel et qu’elle aimait ses enfants. Depuis qu’Eponine était rentrée blessée, elle s’occupait d’elle, parce qu’il le fallait bien, et parce qu’elle n’avait pas envie que sa fille meure, même si c’était des choses qui pouvaient arriver.

Mais ce n’est pas pour autant que la mère de famille oubliait les affaires, il fallait qu’ils continuent à manger, et d’ailleurs, elle avait toujours l’opportunité d’apporter beaucoup d’argent d’un coup. Il fallait qu’elle en parle à son mari, avec toute cette histoire, elle n’avait pas eu le temps de lui en toucher deux mots, depuis la visite de la bourgeoise, mais par chance, le délai accordé par cette dernière n’était pas encore écoulé.

Elle s’assura que sa fille dormait bien avant d’aller rejoindre son mari dans la pièce principale, il allait falloir qu’ils fassent plus ou moins vite, ils n’avaient plus vraiment le temps d’en perdre. Mais bon, ce n’était tout de même pas une décision que l’on prenait à la légère, compte tenu de la complexité de la tâche demandée, mais le butin au bout donnait envie.

« J’peux te causer deux minutes ? »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

Cela faisait déjà un moment que la Thénardier voulait parler à son mari de cette affaire, mais les récents évènements l’en avaient empêchée, d’autant plus qu’il n’était pas toujours présent, et même elle parfois ne savait pas où il allait se traîner. Ils avaient toujours fonctionné comme ça, et son mari avait tendance à s’octroyer quelques libertés supplémentaires, mais c’était parfois pénible de ne pas savoir quand est-ce qu’il serait là, comme quand elle devait lui parler de quelque chose d’important, ce qui était le cas présentement. Elle n’avait aucune idée de ce que son époux penserait de tout cela, mais au moins, elle aurait fait sa part du marché. L’échéance se rapprochait de plus en plus, et il fallait qu’elle ait une réponse à donné à la femme qui l’avait contactée.

Elle ne connaissait toujours pas son nom, et sans doute qu’elle ne le connaîtrait jamais. Elle comprenait, elle prenait ses précautions, vu ce qu’elle demandait, elle ne voulait pas prendre de risques en dévoilant qui elle était. Ça ne dérangeait pas vraiment Mathilde, de ne pas savoir qui elle était. Du moment qu’elle donnait la mise promis, même si le montant n’était pas encore fixé, elle n’allait pas se montrer trop rétissante. Mais avant cela, elle devait en parler à son mari, et le boulot était encore à faire, mais elle savait qu’à eux deux, ils pouvaient faire des miracles, quand ils le voulaient, alors pourquoi pas ? Certes, c’était risqué, et cela allait bien au-delà de leurs magouilles habituelles, mais elle ne perdait rien à lui en parler. Elle ne voulait de toute manière, pas prendre cette décision toute seule, que ce soit pour un refus, ou une acceptation.

"Je t'écoute"

Elle hocha la tête, satisfaite d’avoir son attention. Il semblait curieux, normal, et elle ne pensait pas le décevoir avec ce qu’elle avait à lui dire, elle en était même certaine. Elle s’installa à côté de lui, histoire de ne pas avoir à parler trop fort. On ne savait jamais, et avec un coup comme celui-là, elle n’avait envie qu’aucune oreille indiscrète n’intercepte tout cela, pas même leurs filles. Et elle préférait ne pas tourner autour du pot, ce n’était pas du tout son genre.

« Y’a quelques jours, une femme, une bourgeoise est v’nue pour un service. Elle a dit qu’elle paierait autant qu’on l’voudrait, si on f’sait disparaître quelqu’un pour elle. Il reste encore deux jours avant la fin du délai pour lui donner une réponse. »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

La Thénardier savait qu’elle avait capté l’attention de son mari, et c’était tant mieux. En même temps, celui-là, dès qu’on lui parlait de se faire de l’argent, il était toute ouïe. Ce qu’elle comprenait, et appréciait. Il avait bien raison. Les bénéfices, c’était le plus important. Même si on ne pouvait pas dire que les Thénardier état vraiment en bénéfices. D’avantage en pertes, mais ils faisaient ce qu’ils pouvaient pour palier à cela. Et c’était peut-être l’occasion de justement changer la donne, avec le coup qu’elle lui proposait. Même si cela avait son lot de risques, et qu’ils n’étaient pas forcément négligeables.

Mais elle était tout de même d’avis qu’il était parfois important, même essentiel de prendre des risques, surtout dans ces conditions qui étaient les leurs. Il fallait résoudre leurs problèmes d’argent parce que la situation était de plus en plus difficile à vivre. Même s’ils n’avaient jamais roule sur l’or, c’était une réalité, mais il état une époque, où ils s’en sortaient mieux, lorsqu’ils avaient encore leur établissement. Aujourd’hui, ils n’avaient plus grand chose. Mais cela incluait aussi, qu’ils n’avaient pas grand-chose à perdre. Mais cela ne voulait pas dire qu’il fallait foncer tête baissée. Elle ne voulait surtout pas aller en prison, et encore moins perdre son mari. Ce serait un véritable drame. La femme ne se voyait pas capable d’assurer cette vie seule, et se charger seule des enfants. Ils avaient toujours tout fait à deux, et cela devait continuer. Elle refusait que cela change. Mais c’était tout de même une belle proposition, qui se refusait difficilement. Mais elle préférait laisser son époux prendre cette décision.

"Ça doit être un sacré morceau, pour qu’elle soit prête à se vider les poches"

Elle hocha la tête, effectivement, elle avait de l’argent à se revendre. Elle ignorait à combien s’élevait la fortune de cette femme, mais ce qui était certain, c’est que rien qu’à son apparence, cela se voyait qu’elle était de la haute, et qu’elle était très, très riche, ce qui était une bonne chose pour eux, parce que s’ils avaient trouvé leur vache à lait, ils n’allaient pas la lâcher comme ça.

"C’est qui qu’elle veut qu’on refroidisse ?"

La première chose qu’elle remarquait, c’est que son époux ne semblait en aucun cas gêné par la tâche qu’on leur incombait. En même temps, cela ne la surprenait pas vraiment. Alphonse avait moins de scrupules qu’elle, d‘une manière générale. Mais ils n’avaient cependant pas encore dit oui. Même si elle se doutait que ce serait probablement le cas.

« J’pense qu’elle est vraiment blindée. Y’avait qu’à la voir. Elle veut se débarrasser de l’homme qui rit. T’sais, le gosse du spectacle. J’ai pas d’mandé pourquoi, j’pense pas qu’ce soit important pour nos affaires. »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

La situation n’était pas tellement surprenante. Pas pour la Thénardier. Elle connaissait son époux après tout, probablement mieux que quiconque, alors elle savait ce qui était susceptible de l’intéresser ou non. Et quand il y avait de l’argent en jeu, surtout pour une grosse somme, il devenait tout de suite totalement intéressé. L’issu de tout cela ne faisait pas de doute, dès le départ, elle s’était doutée qu’il serait partant, mais il était tout de même mieux d’avoir son accord avant de décider quoique ce soit en son nom.

Et rien qu’à voir la tête qu’il faisait, elle ne doutait pas qu’elle l’avait largement, son accord. Il était déjà probablement en train de rêver de la somme qu’ils allaient acquérir, mais ce n’était pas un don que cette bonne femme allait leur faire. Il leur fallait exécuter la tâche qui avait été demandée, et la femme ne prenait pas cela à la légère. Il ne s’agissait pas d’une banalité, il fallait tout de même se débarrasser d’un jeune homme.

La mère de famille n’avait jamais fait cela. Elle avait fait toutes sortes de choses, et souvent pas recommandables et légales, mais le meurtre, ça ne rentrait pas en compte sur sa liste. Elle n’était pas forcément contre, mais elle n’était pas non plus la plus heureuse du monde à l’idée de devoir descendre quelqu’un. Il est vrai que vu la somme qu’ils pouvaient se faire, ce serait idiot de refuser, mais elle avait tout de même quelques (très légers) scrupules. Ce dont son époux semblait totalement dénué.

Enfin, ce n’était pas bien grave. Il fallait juste se dire, que c’était un travail comme un autre. Ils étaient déjà considérés comme des criminels, alors un peu plus un peu moins… cela ne devait pas avoir autant d’importance. C’est ce que la femme préférait se dire, et elle comptait sur son époux pour parfaire au mieux leur futur plan d’action. Il ne fallait surtout pas qu’ils agissent de manière désorganisée.

"Ce s'ra un jeu d'enfant. En plus, la gosse les connaît. Elle va finir par nous servir à quelque chose, tout compte fait."

La femme tiqua légèrement. Contrairement à son époux, elle n’était pas certaine que ce soit une bonne chose que Ponine les aide dans cette affaire. La gamine était une gentille fille, elle ne serait sûrement pas partante de participer au meurtre de son ami. Et même sans lui dire, elle finirait par le découvrir, et sa mère ne préférait pas penser aux conséquences par la suite. Alphonse avait toujours été plus dur avec leurs enfants, alors il s’en moquait probablement, de tout cela.

« J’suis pas sûre qu’ce soit une bonne chose d’utiliser la p’tite. Elle est trop sensible. »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

La Thénardier reconnaissait qu’Eponine pourrait être utile pour leur petite affaire. Du moins, en théorie, mais pour ce qui était de la pratique, la femme avait tout de même quelques doutes. Et pour cause. Si jamais elle avait connaissance de toute l’affaire, jamais elle ne voudrait aider ses parents, et les prendrait pour des monstres. Ils n’avaient pas besoin de ça. Déjà que leur fille avait des idées bizarres dernièrement, comme aller sur les barricades, ce n’était pas la peine de mettre encore plus les feus aux poudres. Mais elle connaissait son époux, et quand il avait une idée en tête, il était difficile, voire impossible, de l’y déloger. Sa détermination (ou plutôt le fait qu’il soit têtu comme un âne) était quelque chose qui lui avait toujours plus, mais c’était aussi parfois quelque peu agaçant, surtout quand il était contre elle.

Ça ne durait jamais bien longtemps, les deux époux finissaient toujours par être du même avis. Et ce n’était pas toujours elle qui lâchait prise. C’est qu’elle avait la tête dure, et elle n’était pas du genre à plier. Le mariage amenait son lot de concessions, c’est vrai, mais elle n’était pas pour autant soumise à son époux. Elle n’avait pas peur de lui, et n’avait aucune raison d’avoir peur. Elle avait toujours agi pour le bénéfice de leur famille, et ne comptait pas changer son fusil d’épaule, mais elle voulait faire ça du mieux possible.

"Eh bien raison de plus, il est temps de lui mettre du plomb dans la cervelle, qu'elle nous serve à quelque chose. Elle a pas besoin de savoir ce qu'on va faire du défiguré, juste gagner sa confiance pour le jeter dans la gueule du loup. Pour le reste, on en fera notre affaire."

Comme elle l’avait prédit, il ne changeait pas d’avis concernant Eponine, mais la femme continuait de penser que ce n’était pas la meilleure option. Eponine avait beau ne pas être fait du même bois qu’eux, elle n’était pas idiote pour autant. Mais bon, peut-être que cela pourrait marcher. Elle avait toujours eu un peu plus de considération pour ses enfants que son mari (ce qui ne faisait pas non plus d’elle la mère de l’année, il ne fallait pas pousser) mais elle reconnaissait que les filles avaient besoin de s’endurcir. Mais ce n’était pas forcément la meilleure des façons.

« A c’que j’vois t’as déjà pris ta décision d’toute manière. J’espère juste que ce sera avec raison. »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

La Thénardier reconnaissait qu’en un sens, le plan de son mari avait du sens. Sur le papier, ça pouvait fonctionner, mais elle avait tout de même quelques doutes. Sa fille n’était pas fiable. Ce n’était pas un constat qui visait à mal, mais Ponine ne marcherait pas avec eux si elle était au courant de l’affaire, et même si elle en ignorait tous les détails, aussi naïve pouvait-elle être, elle n’était pas si bête. Elle pourrait très bien comprendre pendant, ou même après, et ça pourrait leur amener quelques pépins. Des pépins dont la mère Thénardier ne voulait pas. Le but était d’amasser un maximum d’argent, mais sans devoir gérer une nouvelle crise existentielle de leur fille parce qu’ils auraient tué un de ses pseudo-amis.

La femme n’avait jamais craint contredire son époux. Même s’il pouvait se montrer particulièrement détestable quand il le voulait, violent, cruel et ce qu’on voulait, il ne lui avait jamais rien fait à elle. En général, c’était les filles qui trinquaient quand il était de mauvais poil, mais il l’avait tout de même toujours relativement écoutée. En même temps, elle était de son côté, elle voulait que les affaires marchent, qu’ils aient une vie meilleure, et elle le suivrait dans toutes ses combines, mais elle ne le faisait pas sans réfléchir.

"J'ai encore rien décidé. Je prends toutes les idées, c'est un gros coup, faut pas qu'on le foire. T'as d'autres idées ?"

Elle était de son avis. C’était un gros coup, et ils n’avaient pas le droit à l’erreur. Cette bourgeoise était venue frappée à leur porte comme si elle était leur bonne étoile, il serait donc complètement absurde de tout gâcher. Une idée toute prête, elle n’en avait pas. Mais elle restait sceptique quant au fait d’utiliser leur fille. Que ce soit Ponine ou Zelma, elles étaient toutes les deux gourdes quand il s’agissait des affaires. Mais il était hors de question que cette histoire tombe à l’eau, il y avait beaucoup trop d’argent en jeu.

« De ce que j’sais, le gamin n’est pas bien futé. L’attirer quelque part ne sera pas dur, d’autant qu’il est très proche de l’autre gosse qui joue avec lui. Alors ce ne serait pas dur de lui faire croire qu’il doit la retrouver quequ’part. Ponine n’est pas fiable, vu l’coup qu’c’est, autant mettre toutes les chances de notre côté. »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

La Thénardier n’avait pas la prétention de penser que son plan ne présentait aucune faille, mais elle avait tout de même l’idée de penser qu’ils pourraient se servir de la jeune fille. Pour simple raison qu’il lui faisait probablement confiance. Et aussi parce qu’elle pensait vraiment qu’utiliser Ponine n’était pas une bonne idée, qu’elle soit au courant ou pas. Ils ne pouvaient pas lui faire confiance pour ce qui était de travailler, il fallait toujours qu’elle finisse par en faire à sa tête, d’autant que maintenant lui étaient poussées des idées révolutionnaires, non, mieux valait éviter qu’elle flanque tout par terre.

Et puis, elle n’était pas totalement remise de sa blessure, et même si son père n’hésitait pas à l’envoyer au charbon, sa mère avait quelques scrupules supplémentaires, elle n’avait pas envie que l’état de sa fille empire, que sa blessure s’infecte et qu’elle finisse par y passer. Elle n’était pas la meilleure mère qui soit, c’était un fait, mais elle ne souhaitait tout de même pas la mort de ses gamins. Elle s’était donnée du mal à les élever, à les garder en vie jusqu’à maintenant, inutile de tenter le diable. Ponine n’était ni fiable, ni en état, alors cela la mettait hors course aux yeux de la femme.

"D'accord, se servir de la petite aveugle, c'est un bon plan. Mais comment on peut être sûr qu'il est aussi bêta que tu l'dis. S'agirait pas de se faire avoir parce qu'il finirait par s'avérait que le défiguré en a dans le ciboulot."

Il reconnaissait que son idée était bonne, et c’était déjà un bon point. La mère de famille avait toujours estimé qu’ils étaient sur un pied d’égalité, pour élaborer des combines, et qu’en général, ils se complétaient bien, c’était pour cette raison que cela fonctionnait bien, enfin, jusqu’à ce que des indésirables viennent mettre leur grain de sel dans leurs affaires et que tout s’écroule, évidemment. Mais ils avaient la chance, l’opportunité de se refaire, et ils ne devaient pas la laisser passer, sous aucun prétexte. Cependant, ils ne pouvaient pas totalement avancer à l’aveugle, son mari avait raison, il fallait que leur plan soit totalement cadré, et sans erreur possible pour être sûr qu’ils puissent avoir ce qu’ils voulaient.

« Tu connais personne dans c’milieu qui pourrait être utile ? Les artistes ça cause souvent entre eux non ? »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

Sur le fait qu’ils allaient bel et bien agir, et accepter la proposition de la duchesse, la question semblait régler. Mais la femme n’était pas très étonnée, elle connaissait son mari, elle le savait appâter par le gain, qu’importe ce qu’il doive faire. Elle ne le lui reprochait pas, cela faisait à ses yeux, un homme ambitieux, et elle appréciait ce trait. D’ailleurs, elle y trouvait un certain écho. Elle aussi, était attirée par l’argent, et acceptait de faire bien des tâches pour en gagner quelque peu. Mais pour une fois, c’était beaucoup qu’ils pouvaient en amasser, un seul gros coup, et il s’agissait de en pas se rater.

Il ne fallait pas qu’il y ait la moindre faille dans leur plan. Et il ne fallait pas que ce gosse ait la moindre chance de s’en tirer. C’était triste pour lui, mais c’était comme ça, il n’était pas né sous la bonne étoile. La mère Thénardier ne suivait absolument pas les affaires de famille des nobles, et elle ne savait pas réellement tout ce qui tournait autour de ce gosse, mais quand bien même, ce qui importait vraiment, c’était la récompense promise si le petit venait à disparaître.

"Y a rien de moins fiable qu'un artiste, je préfère me méfier de tout ce qui sort de leur bouche, défigurée ou pas"

L’épouse aurait plutôt tendance à dire que personne ici-bas ne l’était. Mais il est vrai que les artistes étaient connus pour être des têtes en l’air, des marginaux, qui n’étaient animés que par leur art, et ainsi, il n’était pas évident de se fier à tout ce qu’ils pouvaient dire. Mais bon, il leur fallait tout de même réussir à trouver quelque chose, la bonne idée, qui ferait la différence, qui changerait tout. En dernier recours, ils pourraient toujours user de Ponine, mais la mère préférait réellement que ce soit la toute dernière, et seule option restante.

"Claquesous doit avoir moyen de me tuyauter, je pense. Je verrai ça avec lui, dans tous les cas, va falloir faire vite."

Faire vite, oui, mais pas non plus se précipiter. C’était dans la précipitation qu’on commettait des erreurs, et il était inutile d’en faire dans cette situation. Il serait même dangereux d’en commettre. Mais la mère de famille voulait garder confiance, et penser qu’ils y arriveraient, et qu’ils allaient trouver le plan parfait. Après tout, ils étaient doués, quand il s’agissait d’élaborer des plans, cela leur avait toujours réussi, alors pourquoi cela devrait-il être différent cette fois-ci ?

« Très bien. Il faut déjà qu’on dise à la bourgeoise qu’on accepte son offre. »

black pumpkin

Dans la richesse comme dans la pauvreté

Les choses avançaient, et ils étaient tous les deux d’accord pour accepter la proposition de l’autre bourgeoise. La Thénardier ne se serait jamais imaginée qu’elle plongerait dans l’assassinat. Certes, ils étaient des magouilleurs, mais ils n’avaient jamais zigouillé personne. Mais bon, que ne ferait-on pas pour des pièces d’or ? Quoiqu’il en soit, il leur restait encore à monter un plan rudement bien ficelé. Ce n’était pas le genre de coup qui devait avoir des failles. Il fallait qu’ils soient sûrs de ce qu’ils avaient à faire, et à ne laisser aucune chance au gosse. S’il s’en sortait, ils pourraient vraiment avoir de sérieux problèmes, et ce n’était pas le moment d’en rajouter.

Mais elle était bien contente que son mari soit aussi enthousiaste. Elle n’était pas spécialement une surprise, dès qu’il y avait de l’argent à se faire, en général, il était partant. Et elle le comprenait parfaitement là-dessus. Mais bon, ils avaient du travail avant de pouvoir empocher cet argent. Il fallait déjà commencer par annoncer à leur commanditaire qu’ils étaient d’accord pour effectuer ce qu’elle demandait. Cela ne devrait pas trop poser de problème, mais il fallait aussi définir le prix qu’ils voulaient exactement, c’était important. Plus qu’important.

"J'te laisserai gérer la bourgeoise. La contacte pas trop vite, faut laisser le temps au plan de mariner. Je vais parler aux patron-minette, quand ce s'ra fait et qu'on se sera divisé le gros d'la besogne, tu pourras faire des courbettes à la vieilles qui veut pas se salir les mains."

Oui enfin, ce n’était pas la peine d’avoir des dizaines et des dizaines de complices. Le but ce n’était pas qu’ils se retrouvent à la fin avec trois malheureuses piécettes. Mais il est vrai qu’il serait plus facile, s’ils étaient plusieurs. Enfin, elle allait laisser son époux gérer tout ça, elle, elle voulait bien s’occuper de la bourgeoise pour le moment.

« Très bien. Mais n’en parle pas non plus à trop de monde, parce qu’au final, en plus de diviser la besogne, il faudra diviser l’argent. »
"On va s'en mettre plein les poches, ça mérite bien qu'on célèbre ça. Qu'est-ce que tu te dirais d'aller se rincer le gosier dehors. On peut bien s'autoriser une ardoise dans n'importe quel comptoir de Paname, c'est la bourgeoise qui rince, pas vrai ?"

Oui, il est vrai que fêter leur prochaine richesse était une idée tentante, mais était-il bien raisonnable de dépenser un argent qu’ils n’avaient pas encore ? Sans doute pas. Mais les Thénardier n’étaient pas connus pour être des personnes raisonnables. Alors bon…

« Pourquoi pas… mais n’oublie pas qu’elle ne rince encore rien pour le moment alors n’exagère pas trop non plus. »

black pumpkin